Apprendre avec #4 | Elliott Erwitt
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Aujourd’hui dans Apprendre avec nous nous intéressons au grand Elliott Erwitt (1928 - 2023), disparu il y a peu. Pilier de la prestigieuse agence Magnum où il était entré en 1954 sous la houlette de Robert Capa, ce photographe connu pour ses images en noir et blanc candides et souvent drôles est l’auteur de quelques-unes des plus emblématiques photos du XX° siècle.
Voyons ensemble quelles sont les différentes leçons que nous pouvons tirer de son œuvre et de sa vie et appliquer à notre pratique de la photographie.
1. CRÉEZ DES IMAGES QUI FONT SOURIRE
L'humour était une composante essentielle du travail d'Erwitt. Il utilisait souvent des situations cocasses pour transmettre des commentaires subtils sur la condition humaine. “Si mes photos permettent aux gens de voir le monde d’une certaine façon, c’est certainement d’y voir les choses sérieuses de manière non sérieuse” affirmait-il.
Comme Erwitt, apprenez à repérer les moments drôles ou ironiques dans votre environnement et utilisez-les pour créer des images qui suscitent le sourire ou la réflexion chez les spectateurs.
2. AYEZ TOUJOURS UN APPAREIL PHOTO À PORTÉE DE MAIN
“Je mets un point d'honneur à toujours avoir un appareil photo avec moi… Je photographie simplement ce qui m'intéresse à ce moment-là”.
Né à Paris en 1928, Elliott Erwitt a grandi à Milan et à Los Angeles, avant de s'installer à New York. Sa carrière l'a amené à voyager à travers le monde, capturant des images dans une multitude de contextes et de cultures. Connu pour son travail de rue, Erwitt était constamment à l'affût de moments spontanés et significatifs dans les environnements urbains.
Cependant, ce qui distingue Erwitt, c'est son engagement à toujours avoir un appareil photo à portée de main, peu importe où il se trouvait. Même lorsqu'il était chez lui ou dans sa voiture, il ne laissait pas son appareil loin de lui. Il n’y a pas de sous-sujet chez Erwitt. On trouve dans son œuvre autant des images de ses nombreuses commandes que de la vie quotidienne. Cette habitude lui a permis de saisir des instants fugaces et de capturer des moments uniques, même dans les situations les plus ordinaires. C’est cette disponibilité constante qui lui a permis de créer une vaste collection d'images variées.
3. OBSERVEZ, ENCORE ET TOUJOURS
Dans la continuité de la leçon précédente, Erwitt comprenait que la clé pour créer des images puissantes résidait dans une observation minutieuse et constante.
Que ce soit en marchant dans la rue, en voyageant dans un pays étranger ou même en restant chez lui, Erwitt avait l'habitude d'observer attentivement son environnement. Il croyait que chaque instant est unique et potentiellement photographique, et il s'efforçait de rester ouvert et réceptif à ces moments fugaces.
“Pour moi, la photographie est un art de l’observation. Il s’agit de trouver quelque chose d’intéressant dans un lieu ordinaire… J’ai découvert qu’elle a peu de rapport avec les choses que l’on voit et tout à voir avec la manière dont ont les voit.”
Le conseil d'Erwitt est précieux : prenez le temps d'observer le monde qui vous entoure. Soyez attentif aux détails, aux gestes subtils et aux interactions humaines. Plus vous observez, plus vous développerez votre sens de l'observation et votre capacité à capturer des images significatives.
4. RECADREZ VOS IMAGES SI NÉCESSAIRE
Le sujet du recadrage en photographie est un peu délicat. Certains le considèrent comme de la triche. D’autres l’utilisent pour nettoyer à la marge une image. Erwitt faisait partie d’une troisième catégorie, ceux pour qui le recadrage était un art à part entière. Pour lui, recadrer offrait la possibilité de recomposer complètement et de changer le sentiment d’une image.
“Il y a deux compositions. Il y a la composition encadrée par le viseur et il y a la composition dans l'image. La deuxième peut être présente même si la première est mal organisée. Donc je ne suis pas contre le recadrage quand c'est vraiment nécessaire. Certains ont une attitude fétichiste sur ce sujet, mais il n'est pas immoral de recadrer. Bien sûr, c'est mieux si vous n'avez pas à le faire.”
5. AIMEZ LES CHIENS
La fascination d’Elliott Erwitt pour les chiens remonte aux années 40, alors qu’il arpentait appareil au poing les rues d’Hollywood, en adolescent solitaire. Il voyait en ces fidèles compagnons une source inépuisable d'inspiration et de joie. Pour Erwitt, les chiens représentaient l'innocence, la loyauté et la spontanéité, des qualités qu'il aimait capturer à travers son objectif.
"J’ai projeté une composition mentale et photographique sur eux, joué avec leur image grâce à des moyens géométriques et organisé le cadre afin qu’ils deviennent miens."
L'amour d'Erwitt pour les chiens va au-delà de la simple admiration. C'était une partie intégrante de son identité artistique et de sa vision du monde. Les chiens étaient pour lui des personnages à part entière, capables d'ajouter une touche d'humour, de tendresse ou de poésie à n'importe quelle scène. Tout comme le photographe avec ses amis canins, faites preuve d’empathie, et utilisez vos sujets préférés pour réaliser « des images drôles qui ne se moquent pas ».
BONUS : ANALYSE D’UNE IMAGE
Terminer cet article sans mentionner l'une des images les plus célèbres d'Erwitt serait passer à côté d'un élément crucial de son héritage photographique. L'image emblématique de l'homme au parapluie sautant à Paris est une illustration parfaite de l'approche unique et de la vision artistique d'Erwitt.
Dans cette photographie, capturée à Paris en 1989, nous voyons un homme joyeusement sauter dans les airs, tenant fermement son parapluie ouvert. La Tour Eiffel se profile en arrière-plan, ajoutant une dimension supplémentaire à l'image déjà riche en symboles.
Révélant un art du cadrage millimétré, le cliché d’Erwitt représente le saut de l'homme au cœur des enjeux. C’est une image à la fois énergique et contemplative. La composition évoque un sentiment de vivacité dans un décor éternel, celui de l’Esplanade du Trocadero.
La captation du mouvement précis et éphémère de l’homme au parapluie en suspension renforce l’idée d’”instant décisif”, concept associé à Henri-Cartier Bresson, et évoque un autre cliché parisien du célèbre photographe français.
La silhouette sombre du personnage principal mais aussi celle que formée par le couple sur la partie droite de l’image contrastent parfaitement avec le ciel lumineux et la Tour Eiffel en arrière-plan, créant une image frappante qui attire immédiatement l’attention du spectateur. Les triangles formés par les différents protagonistes et le monument renforcent la sensation de dynamisme. La présence du monument, symbole intemporel de Paris, garantit quant à elle que l’image sera toujours pertinente et significative.
Enfin, de petits détails comme certaines silhouettes de passants qui répondent d’une certaine manière aux statues de bronze du Trocadéro, ou encore l’individu disposé tout juste dans l’axe de la Tour Eiffel, viennent ajouter à la fois un dialogue propre et un sens de l’échelle plus qu’intéressant.
Ces éléments renforcent la profondeur de la composition et ajoutent des couches supplémentaires de signification à l'image. En intégrant ces détails minutieux, Elliott Erwitt parvient à créer une image qui invite le spectateur à plonger plus profondément dans l'histoire qu'il raconte, et nous prouve en un seul cliché toute l’étendue de son talent.
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