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Apprendre avec #5 | Ara Güler


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Ara Güler (1928-2018), surnommé “l’œil d’Istanbul”, est sans aucun doute le photographe turc le plus influent de sa génération, et un auteur qui a laissé une empreinte indélébile dans le monde de la photographie. À travers son objectif, il a capturé des moments poignants de la vie quotidienne de son pays et de sa ville. Aujourd’hui, en étudiant son œuvre dans Apprendre avec, nous allons découvrir des leçons précieuses pour enrichir notre propre pratique photographique.

Tombée de la nuit dans le quartier de Zeyrek, Istanbul. © Ara Güler | Magnum Photos

1. PHOTOGRAPHIEZ VOTRE ENVIRONNEMENT IMMÉDIAT

À l'image d'Ara Güler, natif d’Istanbul, qui a consacré une grande partie de son travail à capturer la vie quotidienne dans sa ville, ne négligez pas les merveilles qui vous entourent. On cherche souvent l’exotique, la différence. Pourtant, que ce soit dans votre quartier ou votre ville, vous trouverez toujours des choses qui valent la peine d’être photographiées. Ici, c’est avant tout votre point de vue qui compte.

L'authenticité des lieux et des personnes que vous rencontrerez vous offrira des opportunités uniques de créer des images chargées d'émotion et de caractère. En immortalisant votre environnement immédiat, vous perpétuez la tradition de documenter le monde qui vous entoure, tout en découvrant la beauté dans les détails souvent négligés du quotidien.

2. VOUS ÊTES LES YEUX DU MONDE

Ara Güler a commencé sa carrière de photographe au journal Yeni Istanbul de la ville en 1950. Il a ensuite travaillé pour le quotidien turc Hürriyet, puis a commencé à travailler pour des titres internationaux, lui valant une renommée mondiale. En rencontrant Henri Cartier-Bresson au début des années 60, Güler a rejoint Magnum et est resté proche de nombreux membres de l'agence jusqu'à sa mort en 2018, à l'âge de 90 ans.

“L'art est quelque chose d'important, mais l'histoire de l'humanité l'est encore plus, et c'est ce que les photographes de presse enregistrent. Nous sommes les yeux du monde. Nous voyons au nom des autres personnes."

Pour Güler, la photographie porte une responsabilité primordiale : celle de documenter, de laisser une empreinte pour les générations futures. Même si vous n'aspirez pas à être photojournaliste, il est essentiel de garder à l'esprit cette dimension documentaire dans votre pratique de la photographie, notamment dans la photographie de rue.

En capturant des moments de la vie quotidienne, des scènes urbaines, vous participez à la préservation de l'histoire visuelle de notre société. Qu'elle soit le reflet d'un événement marquant ou d'un instant anodin, chaque image que vous créez peut potentiellement devenir une archive précieuse pour les générations futures.

3. RACONTEZ DES HISTOIRES

Si vous êtes quelqu'un qui photographie les villes, Güler est un auteur évident à explorer. Même si son approche des années 50 et 60 est typique de son époque et peut-être parfois assez éloignée de la street photography comme on l’a reconnaît dans notre contemporanéité, son intérêt portant sur les personnes au sein de l’espace urbain est source d’inspiration. Pour lui, la ville est le décor, ce qui importe, c’est la condition humaine.

Le vieux Istanbul reprend vie chaque fois que notre œil se pose sur l’une des ses images. C’est comme si nous pouvions nous téléporter à ces moments également. Elles racontent une histoire qui vaut bien plus que ce qui est visible au premier coup d'œil.

Des personnes assises discutent à côté d'un café dans une arcade de Beyoglu. 1958. Ara Güler

"Une image d'un paysage n'est pas une photographie. Une photographie ne consiste pas à capturer un beau coucher de soleil ou autre chose de similaire. Quand je regarde une photographie, je devrais pouvoir comprendre ce qu'elle me dit. A-t-elle une histoire ? C'est ça. Une photographie commence à partir de là."

Son intérêt réside ainsi dans les vies que les gens mènent. À votre tour, inspirez-vous de cette facilité avec laquelle il pouvait être avec les gens et les mettre à l’aise afin de raconter leur histoire. Rappelez-vous que ce qui est important c'est la manière dont les gens vivent.



4. NE VOUS CANTONNEZ PAS À UN SEUL STYLE

Surtout célèbre pour ses photographies en noir et blanc émouvantes dépeignant les habitants, les rues et les quais de sa ville bien-aimée, l’héritage d’Ara Güler se révèle en vérité bien plus ample.

Il a réalisé des reportages photographiques à travers le monde, incluant des destinations telles que la Somalie, l'Érythrée et l'Afghanistan. La diversité de son talent se manifeste également dans ses expérimentations précoces avec des collages, ainsi que dans ses œuvres plus récentes où il explore les jeux de lumière et de couleurs.

Güler ne se considérait pas comme un artiste. Il préférait se définir comme membre de la presse, bien qu'il ait concédé que même son travail le plus sérieux était "un peu romantique". Il était pourtant un poète de la lumière, à n’en pas douter. Dans la seconde moitié de sa carrière, il a continué à apporter une sensibilité intime aux images de la Turquie les plus familières pour les étrangers - les jupes blanches des derviches, les dômes et les minarets des mosquées, et les chambres palatiales du hammam de Cağaloğlu.

5. NE PERDEZ PAS DE VUE L’ÉMOTION

Le photographe turc a également pris des photographies de portrait de personnalités importantes, d'artistes, d'écrivains et de politiciens du monde entier, et ces portraits ont constitué une collection importante. Il a immortalisé des célébrités telles qu'Alfred Hitchcock, Salvador Dali, Maria Callas, Sophia Loren, Jacques Prevert, Winston Churchill, Indira Gandhi, Picasso, Marlon Brandon et bien d’autres encore.

La caractéristique principale des photographies de portrait d'Ara Güler est la richesse émotionnelle et la profondeur de ceux-ci.

En traçant les visages et les vies qu'il photographie, l'enthousiasme, l'excitation et le souffle des moments passés ensemble et des conversations imprègnent les portraits d'Ara Güler. "Ce sont mes amis, mes amis. Nous avons passé des jours sans le sou avec la plupart d'entre eux." disait-il en parlant de ses photographies de portrait. "Je n'ai donc pas perdu mon temps et j'ai enregistré leurs visages."

BONUS : ANALYSE D’UNE IMAGE

Dans cette photographie captivante d'Ara Güler, prise en 1958 dans le quartier de Şehzadebaşı à Istanbul, le maître turc nous offre un instant saisissant de la vie quotidienne dans la métropole turque.

Un homme regarde une carriole approcher dans le quartier de Şehzadebaşı, à Istanbul. 1958 | Ara Güler

Au premier plan, nous voyons un homme dont le regard est rivé sur une carriole qui approche. Son expression faciale, que nous percevons à peine, semble mêlée de curiosité et d'anticipation, suggérant peut-être une forme d'attente ou d'excitation pour ce qui est sur le point de se dérouler. Le deuxième individu, moins visible, nous tourne totalement le dos, et de ce fait ne nuit pas à la lecture de la scène car il accompagne cette dynamique. Leurs regards à tous les deux nous invitent par ailleurs à parcourir l’image de format carré (très en vogue à l’époque) en direction de son centre, un mouvement naturel avec ce type de format.

En arrière-plan, la rue animée du quartier se déploie, avec ses bâtiments traditionnels et ses passants anonymes. La lumière forte, qui provient de l'autre côté de l'arche, apporte beaucoup de drame à la scène en mettant en valeur la carriole et les personnages qui l'entourent. Elle crée également de jolies ombres prolongées au sol. La lumière qui tape également sur les bâtiments du fond de l'autre côté de l'arche apporte à la fois un élément esthétique et de la profondeur à la scène, créant une dynamique visuelle qui part du fond de l’image jusqu'à nous.

En venant heurter dans son prolongement le regard intense de l'homme au premier plan que nous avons évoqué au départ, cette lumière établit le point de tension principal de la scène. C’est comme si l’homme était attirée par elle, et naturellement par la carriole.

Cette photographie témoigne à coup sûr de la maîtrise de Güler à capturer l'essence même de la ville et de ses habitants, tout en soulignant son talent pour la narration visuelle et la composition photographique. Une image intemportelle.


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